Le collège Albert-le-Grand à Arcueil
Ce texte relate l’histoire du collège des Dominicains qui occupa de 1863 à 1906 dans le centre ancien d’Arcueil les propriétés des savants Berthollet et Laplace avant que ne s’y installe en 1908 la Caisse des dépôts et consignations. Ce collège est devenu célèbre le 25 mai 1871 lors de la Semaine sanglante sous la Commune par le massacre de cinq Dominicains enseignants dont le Père Captier créateur du collège en 1863 et de huit de leurs employés. Un fait divers a attiré mon attention. En 1892, alors que le R.P Didon est Directeur depuis 1890, un enfant de 14 ans se pend dans la classe où il avait été enfermé. Il sera fait ce qu’il faut pour que ce suicide ne soit pas suivi d’enquête. Henri Didon, célèbre pour sa formule « Citius, Altius, Fortius » devenue la devise officielle des Jeux olympiques, est moins connu pour ses discours de distribution des prix. Le 19 juillet 1898, il prononçait un discours militariste et violemment anti-dreyfusard ayant pour thème « De l’esprit militaire dans une nation ». Il s’en prend (sans le nommer) à Émile Zola qui vient d’être condamné pour diffamation envers l’armée après la publication de « J’Accuse ! ». Cela m’a donné l’occasion d’évoquer l’Affaire Dreyfus mais surtout le dernier combat d’Émile Zola, celui contre les écoles « congréganistes » avec son roman « Vérité ». L’écrivain (qui ne verra pas la fin de la publication du roman car mort accidentellement le 29 septembre 1902) débute par le viol et le meurtre d’un enfant, élève d’une institution catholique ; il y transpose l’Affaire Dreyfus dans le milieu scolaire. L’oncle de l’enfant, un instituteur juif, est accusé du viol et du meurtre ; reconnu coupable, il est condamné. Un autre instituteur, Marc Froment, cherche l’auteur du crime ; il se heurtera aux ecclésiastiques qui feront tout pour discréditer l’école laïque et protéger le meurtrier, l’Église et l’éducation qu’elle prodigue. Ce roman de Zola s’inscrit dans le contexte du débat préparant à la séparation des Églises et de l’État. C’est dans ce contexte que sera fermé le collège Albert-le-Grand le 13 juillet 1906 et les Dominicains expropriés.
Annie Thauront